"La publicité peut sauver le monde"
Parcequ'il est bon parfois de se replonger dans ses classiques, la lecture de Jacques Séguéla "Ne dites pas à ma mère que je suis dans la publicité... Elle me croit pianiste dans un bordel" donne une bonne leçon de communication.
Outre des leçons de courage et de persévérance contées par les hauts et la bas de la carrière du publicitaire, l'ouvrage est parsemé de petites formules "choc" ou homoristiques très communicantes qui donnent de la prodondeur au métier.
Le livre est tour à tour un "manuel du bon communicant" ou un recueil philosophique.
On apprend ainsi que lors d'un pitch chez le client : "La meilleur façon de parler c'est de faire parler les autres" ou que "les légendes publicitaires commencent quand les campagnes finissent".
Mais Séguéla le concepteur, le poète : le communicant, refait bientôt surface et en parallèle du pratico-pratique métier, livre ses motivations les plus belles à être publicitaire.
" Le plus beau verbe de la langue française est le mot "délivrer". On délivre une femme, c'est la naissance. On délivre un prisonnier, c'est la liberté. On délivre un message, c'est la communication".
D'un point de vue plus politico-diplomatique et philosophique " la communication mène à la paix aussi sûrement que l'incommunication conduit à la guère".
Je partage fortement cette opinion et milite pour plus de communication au sens premier du terme entre les peuples, religions, cultures afin de peut-être un jour parvenir à se comprendre.
Pour terminer, en apothéose où Séguéla affirme dans ses dernières pages: "Je l'affirme sans ambages, la publicité peut sauver le monde".
Une telle passion de son métier, se doit d'être relayée !
Edgar Morin / Tariq Ramadan
Un livre des plus surprenant a attiré mon attention cet été : un dialogue entre le philosophe reconnu et encensé Edgar Morin avec le professeur Tariq Ramadan, non moins reconnu mais pas toujours bien vu, notamment en France.
Je suis une fervente lectrice de Tariq Ramadan et ne rate pas une occasion de lire ses essais. Celui-ci mérite particulièrement que l'on s'y attarde car il remet à plat une bonne partie de ses thèses et montre clairement qu' Islam et démocratie, voire même laïcité ne sont pas antithétiques.
Une réflexion intéressante et tout à fait d'actualité sur la culture de la laïcité en France et ses débordements.
"De la même façon, la laïcité, qui se voulait d'abord un système régulant la diversité des religions dans une société plurielle, peut se transformer en un régime fermé d'exclusion du religieux et de normalisation d'un nouveau type de racisme".
Au Péril des idées, presses du Châtelet, page 237.
Voir la laïcité comme un dogme en soi avec ses règles, ses dictats, ses contraintes et ses interdits me parait fort intéressant et très juste.
Je recommande ce livre pour tous les amoureux d'Edgar Morin, les curieux, les adeptes et surtout les sceptiques de Tariq Ramadan.
Une société où cohabiterait sans heurts des cultures, des religions et des principes sociétals, n'est-ce pas cela l'idéal républicain ?
Omar Saghi
Je vous encourage tous à aller jeter un oeil sur le site très réussi du chercheur en sciences politiques Omar Saghi. Il est l'auteur de plusieurs ouvrages consacrés au monde arabe. Il est aussi un homme de lettres et scénariste. Ses articles sont toujours très actuels et abordent des thèmes liés aux sociétés arabes sous toutes leurs formes.
Bonne lecture!
Navrée de ne plus être aussi active qu'auparavant
Navrée de ne plus être aussi active qu'auparavant sur le blog. Je manque de temps... mais je ne manquerai pas de me rattraper très vite!
Al-Jazeera se lance sur le marché français!
Le Qatar n'en finit plus de faire parler de lui en France!
La télévision qatarie Al-Jazira, créée par le Qatar fin 1996 va lancer une chaîne en français et va émettre en anglais depuis la Grande-Bretagne, Ses émissions seront réalisées et diffusées depuis la Grande-Bretagne à raison de cinq heures par jour, aux heures de grande audience. Après cette initiative, la chaîne devrait lancer Al-Jazira Turk.
"J'ai le plaisir d'annoncer que nous sommes dans une étape avancée d'une étude pour lancer une chaîne en français, qui vise à établir des ponts avec les cultures et les peuples amis, en Afrique en Amérique du Nord et en Europe", a annoncé son directeur cheikh Ahmed lors d'un forum organisé par Al-Jazira à Doha.
Décidément, tout le monde semble vouloir "créer des ponts" entre les civilisations ( cf: slogan de la Sorbonne Abu Dhabi "un pont entre les civilisations"). La question est de savoir si les médias et les institutions du savoir suffisent à créer de véritables "pont" avec un Occident méfiant face aux intentions du Qatar et un Orient qui tient avant tout à préserver son identité culturelle ( ce qui est bien légitime...) avant de s'ouvrir à toutes les belles valeurs occidentales.
L'initiative devrait en tous cas permettre d'entériner les préjugés de bien trop de français sur l'image d'Al-Jazira. Non cette chaîne n'est pas un vecteur d'islamisme et ne défend pas les terroristes... la preuve: elle communique (informe) à présent en français!
"La lune de miel entre la France et le Qatar est déjà derrière nous"
Extrait d'une interview de Médiapart parue le 8 mars 2013. Nabil Ennasri, dont j'ai déjà eu l'occasion de parler puisqu'il était un intervenant à l'institut du Monde Arabe, est interviewé et donne son avis sur les liens France/Qatar et sur l'opinion publique française. Karim Sader, un politologue spécialisé sur le Moyen-Orient intervient également.
Une interview très riche, qui remet les pendules à l'heure sur les soit-disant intentions islamisantes du Qatar. Qu'on se le dise, tout ici n'est qu'à intérêt économique. Pas religieux!
Nabil Ennasri. En France, si le Qatar a une image négative, c’est aussi du fait d’une certaine islamophobie d’une partie des élites, qui ne supporte pas d’avoir un émirat et des bédouins qui, comme je l’ai entendu récemment dans un débat, viennent avec leurs chameaux acheter un à un les joyaux de la République. Cela rejoint le regard colonial et paternaliste vis-à-vis du monde arabe. Maintenant que la France, qui a souvent été en avance sur la marche de l’histoire, est dépassée par la Chine, le Brésil, et en plus, par les Arabes du Golfe, cela irrite ces milieux-là. En même temps, pour le Qatar, c’est le retour du bâton, à force d’investissements compulsifs.
Justement, pourquoi les Qataris se sont-ils focalisés sur la France ?
Nabil Ennasri. Pour une France plongée dans la crise, ce pays du Golfe est un eldorado économique avec lequel l’on va forcément maximiser les relations pour pouvoir augmenter ses parts de marché. Dans un environnement éminemment concurrentiel au Moyen-Orient, où les Anglo-Saxons se taillent la part du lion, avoir une relation privilégiée avec un émirat opulent, à qui l'on peut vendre des armes, du BTP, des services, de la com... c’est bon pour notre économie. Petit signe intéressant : on n’a pas beaucoup entendu les autorités françaises au sujet de la condamnation du poète… Pourtant le ministre de la défense, Jean-Yves Le Drian, était là-bas pendant la condamnation, pour superviser un exercice militaire ! Hollande n’a cependant pas poursuivi l'affichage publicitaire, cette relation très personnalisée qu'entretenait Sarkozy avec l’émir. Le souhait de Hollande, même s’il a reçu les Qataris à l’Élysée plus que tout autre représentant arabe, est de davantage diversifier ses débouchés, avec les Émirats arabes unis, avec l’Arabie saoudite.
Karim Sader. Et il faut distinguer là encore les fantasmes de la réalité. La Chine, par exemple, investit davantage en France que le Qatar. Pour les Qataris, la France, c’est une simple marque de prestige. C’est pour cela qu’ils veulent enlever « Saint-Germain » du logo du PSG, parce que c’est « Paris » qui fait vendre. Et puis, sur l’industriel, il y a deux fois plus d’investissement qatari en Grande-Bretagne qu’en France. On arrive à 6 % d’investissement en France sur un fonds de 100 milliards, je ne trouve pas cela énorme. J’ai même la sensation que la lune de miel entre Paris et Doha est derrière nous. Sur le volet diplomatique, comme le dit Nabil, il y a un rééquilibrage en cours du fait de l’insistance des diplomates, qui se taisaient sous Sarkozy. Et c’est heureux.